Les murs de la Nouvelle-Angleterre

Source: https://www.flickr.com/photos/jazzmanjohn/4934687951/
Automn in Massachusetts, photo de John Jazzman (2010), modifié; Source de l’image. Suivre ce lien pour la source de l’onglet. Notez que le lien de l’onglet contient des informations intéressantes sur les murs de Nouvelle-Angleterre.

La Nouvelle-Angleterre est constituée de six États dans le Nord-Est des USA1, bordés au Nord par le Canada, au Sud par New-York, et par l’Océan Atlantique. J’apprends que la Nouvelle-Angleterre est caractérisée par ses murs de pierre, destinés au départ à  séparer Cain et Abel: les mangeurs de moutons et les mangeurs de patates2, les éleveurs et les cultivateurs. C’est une histoire bien connue qui commence dans la Genèse, se retrouve chez Lucky Luke et se déroule sous les yeux des touristes au pays Maasai en Afrique de l’Est3. Tout parallèle bienveillant ou malveillant avec les fameuses enclosures, les Highgland clearances en Écosse et la persistence au XXIème siècle du régime foncier féodal des îles britanniques ne serait pas le fruit du hasard.

Partie d’un panneau routier “touristique” expliquant les clearances dont a été victime la région de Strathy en Écosse. Le panneau est polyglotte (anglais, allemand italien) mais la municipalité doit avoir jugé que des francophones ne s’aventureraient pas aussi près de l’Atlantique nord… Le texte anglais4 (peu lisible sur la photo) et sa traduction française5 sont donnés en note.

Je reviens aux murs de Nouvelle-Angleterre: je lis qu’ils peuvent atteindre 2 m de haut, qu’il y en aurait 240000 miles (386000 km) et qu’il y en a, dans les zones rurales, en moyenne plusieurs km par Ha. On dit que leur volume représente plusieurs fois celui des Pyramides. 

Il y a beaucoup de documentation historique et de photos sur le net anglo-saxophone, par exemple sur le site du Appalachian Mountain Club, où vous apprendrez comment le mérinos ibère (qui est peut-être en réalité berbero-andalou) est arrivé en Amérique grâce à Napoléon, en même temps que le Cheviot remplaçait les indigènes écossais sur leurs terres.   

Cet autre lien de la New England Historical Society  me promet “seven fun facts” sur les murs de pierre. Voici le premier: les murs de Rhode Island ont été construits par les Narrangansetts, groupe Algonquin habitant au départ cette région. Le site m’apprend que les premiers colons ont embauché les Narragansetts pour construire les murs avant la guerre du roi Philip6. Après la guerre, les colons ont simplement réduits en esclavage les Narragansetts et les ont forcés à le faire, cette deuxième appproche coûtant nettement moins que la première!  

Les autres “fun facts” sont un peu plus funs. Allez-les voir! Mais je ne peux pas m’empêcher de penser qu’il y a bien peu de murs de séparation7 qui sont innocents.

Notes

  1. ll s’agit des six États du Maine, Massachusetts, New Hampshire, Vermont, Rhode Island et Connecticut. ↩︎
  2. Avant la lettre. ↩︎
  3. Sans oublier les chasseurs “de luxe”. ↩︎
  4. In the 19th century, our area was still owed by traditional chiefs, and the land was divided into large estates. When economic circumstances became difficult for the landowers, they looked to sheep to provide a more reliable income than their poor tenants. All over the north, communities were “cleared” to coastal land such as Strathy and Armadale, or given assisted passages to Canada and the United States. Some of the most infamous clearances took place in nearby Strathnaver. In 1790 Captain John Machay of Strathy sold his estate to an Edinburgh lawyer, William Honeyman (later Lord Armadale of Strathy). Honeyman was the first to introduce the Cheviot sheep to north Sutherland. He “cleared” Armadale of its tenants, moving them to the current village, and leased the land to sheep farmers from Northumberland, greatly increasing the value of hís estate. In 1813 Honeyman sold the Strathy estate to the Marquis of Stafford, husband of the Countess of Sutherland. By 1815, families living in Upper Strathy had been cleared to the coast, where they joined families removed from Strathnaver. Strathy Mains, the estate’s main farm, was eventually divided into crofts, forming today’s Strathy East and Strathy West. Soon after, Strathy’s church was constructed… ↩︎
  5. Traduction DeepL “revue”. Au XIXe siècle, notre région appartenait encore à des chefs traditionnels, et les terres étaient divisées en grands domaines. Lorsque la situation économique est devenue difficile pour les propriétaires terriens, ceux-ci se sont tournés vers l’élevage ovin, qui leur assurait un revenu plus fiable que leurs pauvres locataires. Dans tout le nord, les communautés ont été « déplacées » vers des terres côtières telles que Strathy et Armadale, ou ont reçu une aide pour émigrer au Canada et aux États-Unis. Certaines des expulsions les plus tristement célèbres ont eu lieu dans la région voisine de Strathnaver. En 1790, le capitaine John Machay de Strathy a vendu son domaine à un avocat d’Édimbourg, William Honeyman (qui deviendra plus tard Lord Armadale de Strathy). Honeyman fut le premier à introduire les moutons Cheviot dans le nord du Sutherland. Il “dépeupla” Armadale de ses locataires, les déplaçant vers le village actuel, et loua les terres à des éleveurs de moutons du Northumberland, augmentant ainsi considérablement la valeur de son domaine. En 1813, Honeyman vendit le domaine de Strathy au marquis de Stafford, époux de la comtesse de Sutherland. En 1815, les familles vivant dans le Haut Strathy avaient été déplacées vers la côte, où elles rejoignirent les familles déplacées de Strathnaver. Strathy Mains, la ferme principale du domaine, fut finalement divisée en petites fermes, formant les Strathy East et Strathy West actuels. Peu après, l’église de Strathy fut construite.. ↩︎
  6. La Guerre du roi Philip est la première guerre amériendienne de 1675-1676. ↩︎
  7. Je tente une petite liste: le limes, le Mur d’Hadrien, la Grande Muraille de Chine, Barrière entre les États-Unis et le Mexique, le Mur de Berlin, les Peace lines de Belfast, la Barrière de séparation israélienne, … Il y a ensuite de nombreux murs de forteresses (Saqsaywaman, Zimbabwe, Troie, Babylone, Constantinople…), et ce n’est que maintenant que je me dis que Wikipedia doit y avoir pensé avant moi . ↩︎

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Jacques
Jacques
11 hours ago

Le Mur de la Peste, la ligne Maginot, le Mur d’Hadrien… Ce qui mériterait un petit développement, c’est comment, ils ont réussi à recréer les grandes propriétés vides de l’Ecosse!

Jacques
Jacques
3 hours ago
Reply to  Jacques

Salut Jacques!

J’aime bien souligner parfois la singularité du régime politique et foncier hybride du Royaune Uni, avec sa Chambre des Lords et ses grand propriétaires terriens. Ceux-ci ont souffert, depuis le BREXIT, du manque à gagner que sont les subsides alloués par la CE aux terres marginales qui, en GBR, sont surtout écossaises. Ce que j’ignorais (d’où ce billet!) c’est que certains aspects de l’agriculture britannique avaient été transposés aux USA. Les enclosures sont une pratique ancienne (schématiquement depuis au moins 1600) de privatisation des communs, tandis que les clearances sont du XiXème siècle. Les murs de Nouvelle-Angleterre sont antérieurs aux clearances qui ont conduit à une vague d’émigration aux USA d’Irlandais (se souvenir de 1845) et d’Écossais mais dont la majorité ne s’est pas installée en Nouvelle-Angleterre.

J’ai fait une petite recherche sur Wikipedia (tous les liens sont à la fin de cette réponse) où j’ai appris que la densité de population de la Nouvelle-Angleterre est de 91 habitants par km² 2025. Pour les deux États du nord (Le Maine et le Vermont) elle est 17 habitants/km² et 27 habitants/km², respectivement. Il se fait que ces deux états ont aussi été la destination des premières vagues d’immigration anglaise dans les annéees 1600. On parle des Old Stock Americans composés à 85% de Britanniques (Anglais et Gallois 65%, Écossais 16%, Irlandais 6%). La population de la Nouvelle-Angleterre était de 27000 habitants em 1650, 350000 en 1750 et 2700000 en 1850. Mais le Maine et le Vermont, partiellement francophones dans le nord, étaient les moins peuplés de ces états (580000 et 314000 en 1850). En 1600, le nombre d’indigènes américains au Vermont est estimé à 10000, dont au moins les trois quarts ont été décimés par les maladies européennes.

On peut donc supposer que les premiers colons établis sur place (au Maine et au Vermont) ont trouvé de facto un vide démographique. Il n’y a quasiment pas de Réserves indiennes dans la moitié Est des USA, sauf quelques micro-territoires dans le nord.

A priori, rien ne s’est opposé aux fait que les “Anglais” de Nouvelle-Angleterre, qui dominent depuis toujours la population locale, ne reproduisent les schémas d’utilisation des terres qu’ils connaissaient chez eux.

Liens Wikipedia consultés: Demographics of New-England, Maine, Vermont, New Englanders, Old Stock Americans, The Thirteen Colonies et Indian reservation.